Pierre Samanos

Parler de sa peinture, lorsque l’on a comme conception que le mot ne couvre pas cette réalité, c’est déjà la trahir et se trahir. Des mots sont disponibles :

métier, vie, amour, volonté, hasard, rencontre, choix,... et puis ?... “ J’en mets et j’en retire jusqu’à ce que ça fasse bien ” disait Bonnard et Braque “ l’Harmonie pour moi, c’est rejoindre un certain néant intellectuel ” et puis ?... Comment je fais ma peinture n’intéresse que moi. Pourquoi je fais ma peinture ? A chacun sa réponse, la mienne n’est pas plus valable... et puis ?...

Il se trouve que “ l’outil-atelier peinture ” a ses exigences, mais que personne n’est obligé d’y pénétrer, d’y travailler... et puis ?...
Lorsque j’y pénètre, que se passe-t-il ? D’abord l’angoisse qui me commande de ressortir. Quand je ne ressors pas, la question est : où en étais-je hier ? Et ces toiles en cours, qui attendent une solution, et moi aussi. Elle est loin la sérénité. Et on en revient aux mots du début, on peut y ajouter : pinceaux, peinture, papiers, toiles, châssis,... plus une infinité de combinaisons qui siègent sur cette surface plane depuis des siècles. Voilà mon métier qui invite celui qui regarde à son propre voyage. A lui de juger ce qui est utile, ici-bas, ou non.

José Ravelo

José Ravelo, c’est l’Espagne, c’est l‘Andalousie ! C’est à la fois le peintre de cette terre de “ sangre y muerte ”, et l’homme de l’espoir, un personnage atypique et attachant, aux limites picturales d’un Goya et au lyrisme d’un Garcia-Lorca.

Entrer dans l’univers de sa peinture, c’est se livrer entier aux mystères romantiques, c’est pénétrer dans une sorte d’aura mystique dont les femmes, “ la femme ! ”, sont le centre de gravité, c’est s’ouvrir malgré soi à un monde du réel qui repousse nos frontières aux limites de notre imagination. Les personnages de Ravelo, erratiques, angoissés et angoissants, les yeux noyés dans des horizons qui nous sont imperméables, révèlent au premier regard la fragilité des hommes et l’incommensurable profondeur de leur nature.

Mais il y a de l’amour, beaucoup d’amour, dans ce théâtre d’ombres et de couleurs, et, pour qui connaît un tant soit peu José, il y a beaucoup de lui-même, avec cette tendresse et cette amitié, qui, dès le premier abord, vous mettent les larmes aux yeux et vous poussent vers lui. Il est aussi l’homme des couleurs, ces couleurs qui n’appartiennent qu’à lui et qui sont l’alliance d’un méphistophélique savoir et d’une grande expérience des mélanges et des recettes d’où naissent ces outremers, ces amarantes, ces ocres et ces noirs plus sombres que la nuit, tous ces tons qu’éclaire toujours une petite lumière, souvent l’astre de la nuit, symbole de la féminité, de la mère, inséparable icône du cosmos du maître.

Laure Mary

Le noir ou le blanc en toile de fond, l’or ou l’argent au fil du temps, je tisse mon tableau avec la force et la puissance de la matière, l’essence des couleurs, lavibration de la toile et l’émotion du sujet.

Laure Mary nous raconte des histoires, des histoires d’amour, des histoires de tous les jours, comme des chansons éternelles et intemporelles, des petites histoires tendres et légères, douces ou amères, poétiques et romantiques, des petites portes ouvertes sur les sentiments, la vie, l’amour.
Douce folie, tendre passion, ses pinceaux pianotent sur la toile, où se mêlent couleurs et formes en fusion, où matière et lumière se dévoilent. Derrière les visages anonymes se dessinent les corps impudiques, les courbes arrondies se révèlent belles, sensuelles... éternelles.
La passion et l’émotion sont le fil conducteur de ses toiles, comme un cri de liberté, un élan de vie, un désir d’essentiel.

An-Yu Liao

D’où provient l’étrange fascination qu’exercent sur nous ces intérieurs niortais ?
Réminiscence de la chambre de Vincent à Arles ?

Peut-être, mais on n’y pressent pas de drames à venir. Henri Matisse ? Sans doute, mais l’espace figuré est plus palpable, la lumière qui le baigne plus douce, plus paisible.

La sérénité que confèrent ces œuvres provient plus certainement de la sobriété de leur composition, de la pureté de leurs lignes et de l’harmonie subtile de leurs couleurs. L’art de leur auteur, LIAO An-Yu, est tout empreint de la finesse légendaire de son Extrême-Orient natal.

LIAO An-Yu poétise tout ce que son regard embrasse, scènes de vie des paysans et des pêcheurs taïwanais, paysages urbains ou ruraux de la France où elle a choisi de vivre, univers légendaires de son enfance.

A moins de 40 ans, cette artiste née et formée dans l’île de Taïwan a déjà produit une œuvre considérable récompensée par de nombreuses distinctions.

David Chauvin

Aujourd’hui, comme hier,
J’ouvre mes volets, bleu outremer,
Grille-pain, café, sienne foncée,
Aujourd’hui sur France Info, bleu indigo.
Déjà mon atelier m’attend, laque de garance.
De la fenêtre, un trait de lumière caresse mes outils, auréoline et d’un peu plus loin, le ciel se joue de ses oiseaux, bleu phtalo.
Je suis fin prêt pour une nouvelle aventure, gomme gutte, mes papiers, mes pinceaux et mes tubes s’impatientent, rouge permanent.
C’est parti, je me lance, petit gris, spalter, martre kolinsky, tous y passeront, jaune citron, de toute leur fougue et leur passion, se mélangeront, et se conjugueront à mes amis : alitrazine, auréoline, violet de mars, vert de colbalt, bleu phtalo, vert émeraude...

Clarisse Chauvin

Clarisse Chauvin qualifie ses tableaux de figuratifs. Et pourtant !... Les personnages que nous pouvons retrouver ne sont que de longues silhouettes, les habitations que de simples formes géométriques.
Mais c’est suffisant pour percevoir et ressentir son univers. Clarisse Chauvin veut laisser à chacun la possibilité d’entrer en contact avec son œuvre et de l’interpréter. Il en est de même pour ses écritures, voire même ses messages, que nous pouvons lire ou deviner au fil des tableaux.

En ce qui concerne sa technique, directement au service de son style bien identifiable, elle repose essentiellement sur le collage.

Bozo

Avec un lapidaire, dans le schiste compact, en plein vent
dans un nuage de poussière masqué, casqué
il fait de la broderie.

Tu écoutes la pierre, tu entends un son franc et solide, alors tu sais qu’elle peut souffrir pour être belle. Tu ne la ménages pas avec ton lapidaire, mais elle reste docile ; tu sais bien la traiter pour qu’un rayon de lumière traverse le gris bleuté, pour que les motifs venus du fond des âges décorent les à-plats rugueux, pour qu’elle donne à regarder, pour qu’elle nous fasse retrouver une pensée qu’on avait négligée, puis oubliée.

Marie Rialland

Bozo totem

Soraya Azouz

La série de tableaux présentés s’est construite sur fond de polémique concernant le fichier “ Edvige ”.
Sa peinture lui permet un propos mêlant la gravité

d’un sujet, tel que le fichage des individus, à une vision poétique.
Elle oppose deux dynamiques. La première voudrait figer et cataloguer à l’aide d’un étiquetage administratif (comme l’impliquait le fichier “ Edvige ”) mais très vite cette première dynamique apparaît vaine. La seconde renvoie davantage au vécu et à l’affectif que chacun entretient au monde. C’est évidemment au contact de celui-ci que se fabrique la personne.

Soulignant ces forces antagonistes, Soraya mêle, ici, différentes expressions graphiques et picturales. Rompant avec les froides fiches signalétiques qui au regard d’une administration définissent les individus de façon irrévocable, le fil conducteur de cette série de tableaux est une frise de couleur composée d’une accumulation de petits points évanescents. Ils symbolisent la perte de mémoire, la fuite du temps mais peut-être aussi la force de construction identitaire toujours en mouvement, en redéfinition et à tout le moins, jamais stabilisée.

Martine Adema

La diffusion de la photographie au XIXème bouleverse la peinture : plus besoin de subir de longues heures de pose pénible pour obtenir une image fidèle de soi, Félix Nadar et ses compères fixent pour

la postérité, en un clic, les instants de votre célébrité.

Plus besoin de peindre Vrai ! Adieu van Eyck, adieu Raphaël, adieu les pauvres peintres illusionnistes ; le tableau n’est plus qu’un espace plat où lignes et couleurs s’entrechoquent en de nouvelles harmonies.

Alors que recherche Martine Adéma dans la reproduction méticuleuse de ces portraits photographiques ? Capter le réel ? Non. On sait que la photo ne donne pas une image réelle de son sujet mais seulement vraisemblable, réaliste. Donner une image picturale vraisemblable de cette première image photographique et nous voilà dans l’hyperréalisme. Martine Adéma dénonce ainsi le mentir-vrai de ces images qui trompent l’œil.

Ce que Martine Adéma affirme par sa quête méticuleuse, c’est que la beauté est la pure création de l’Artiste, que c’est lui qui invente l’harmonie des visages et sublime l’expression des sentiments.

A travers ces portraits, Martine Adéma vous invite à partager sa longue quête sensible, esthétique et morale de l’humanité multiple.

Ne regardez donc pas ces œuvres comme des images, mais, par un effort de tension de tout votre être, essayez de partager cette formidable et patiente alchimie qui donne naissance à leur lumineuse beauté.